Rupture précoce de prothèse et responsabilité du fait des produits défectueux
A la suite de la rupture de la tête fémorale d’une prothèse de hanche posée le 23 février 2006, mise en évidence par une radiographie pratiquée le 28 décembre 2006, le patient a subi une intervention, le 4 janvier 2007, afin que soient retirés les débris de la tête céramique et mise en place une nouvelle tête en métal.
A l’issue de l’opération, il a présenté plusieurs complications ayant nécessité des réinterventions, à l’origine de séquelles.
A la suite de l’avis rendu par la Commission de Conciliation et d’Indemnisation des Accidents Médicaux territorialement compétente (la CCI), l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux, des Affections Iatrogènes et des Infections Nosocomiales (l’ONIAM) a indemnisé le patient victime de ses préjudices et a exercé un recours contre le producteur de la prothèse, en présence de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (la CPAM) qui a demandé le remboursement de ses débours.
Par arrêt en date du 9 décembre 2019, la Cour d’Appel de TOULOUSE a déclaré le producteur de la prothèse responsable du préjudice subi par le patient et l’a condamné à payer à l’ONIAM et à la CPAM diverses sommes.
Le producteur s’est alors pourvu en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de son pourvoi, ce dernier conteste toute responsabilité de sa part dès lors qu’il n’aurait pas été rapporté la preuve d’un quelconque défaut du produit ; la simple rupture de la prothèse ne saurait démontrer, en elle-même, un quelconque défaut.
Par ailleurs, le producteur estime qu’il ne saurait être tenu d’indemniser les complications subies par le patient à la suite des opérations de reprise rendues nécessaires par plusieurs « accidents médicaux non fautifs » et notamment de l’étirement du nerf sciatique lors de l’opération du 10 janvier 2017, de l’infection contractée lors d’une des opérations et du non-respect par le chirurgien des consignes du fabricant dans le choix et le montant de la prothèse de remplacement.
Toutefois, par arrêt en date du 2 février 2022 (Cour de cassation, Civile 1ère, 2 février 2022, Pourvoi n°20-15526), la Cour de cassation a rejeté l’argumentation développée par le producteur et confirmé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de TOULOUSE.
Comme le rappelle la Cour de cassation, après avoir écarté, en se fondant sur le rapport d’expertise, l’éventualité que la rupture de la prothèse soit imputable à un surpoids du patient, à une chute ou un comportement inadapté de sa part ou encore à la technique opératoire et au matériel choisi, la Cour d’appel a retenu que cette rupture était intervenue dans un très court délai après la pose de la prothèse.
Sans inverser la charge de la preuve et en s’en tenant à la simple imputabilité du dommage à la rupture de la prothèse, elle a pu en déduire que celle-ci ne présentait pas la sécurité à laquelle le patient pouvait légitimement s’attendre et était défectueuse.
Par ailleurs, dès lors qu’elle a constaté que la rupture de la prothèse initiale était à l’origine non seulement de l’opération de reprise mais aussi de tous les actes chirurgicaux subséquents et des dommages successifs qui en ont résulté pour le patient, la Cour d’Appel n’a pu qu’en déduire que la responsabilité du producteur était engagée au titre de l’ensemble de ces dommages.
Le producteur sera donc tenu d’indemniser l’ensemble des conséquences imputables à la rupture précoce de la prothèse de hanche.
Article rédigé avec la participation de Madame Bertille COUTELLE, stagiaire en M2 de Droit de la Santé.