Indemnisation possible de l’incidence professionnelle, en plus des pertes de gains professionnels futurs, en cas d’inaptitude de la victime à exercer une quelconque activité professionnelle
Une petite fille, née au cours de l’année 1997, a été victime d’actes de violences volontaires et de privation de soins et d’aliments sur mineure de 15 ans par ses parents, ayant entraîné une infirmité permanente.
Représentée par sa tutrice aux biens, la victime et son tuteur à la personne ont saisi la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions (la CIVI) territorialement compétente afin d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices.
Par arrêt en date du 2 novembre 2022, la Cour d’Appel de MONTPELLIER les a toutefois déboutés de leur demande au titre de l’incidence professionnelle.
Pour ce faire, la Cour d’Appel de MONTPELLIER a considéré que l’impossibilité totale et définitive pour la victime de générer des gains professionnels, constatée par l’Expert, était déjà indemnisée par le poste de pertes de gains professionnels futurs.
Elle ajoute qu’une victime privée de toute possibilité d’activité professionnelle n’est pas fondée à solliciter l’indemnisation d’une incidence professionnelle, qui n’existe pas.
Selon la Cour d’Appel de MONTPELLIER, l’incidence professionnelle subie par la victime serait donc déjà indemnisée par ses pertes de gains professionnels futurs.
La victime et ses tuteurs se sont pourvus en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de leur pourvoi, ils rappellent que le préjudice lié à l’incidence professionnelle, qui répare les retentissements du dommage corporel sur la sphère professionnelle, notamment sur l’inaptitude pour la victime à exercer une quelconque activité professionnelle, ne se confond pas avec la perte de gains professionnels futurs.
Une victime est bien fondée à solliciter deux indemnisations, l’une au titre des pertes de gains professionnels futurs et l’autre au titre de l’incidence professionnelle.
Par arrêt en date du 30 mai 2024 (Cour de cassation, Civile 2ème, 30 mai 2024, Pourvoi n°23-10181), la Cour de cassation a censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de MONTPELLIER et fait droit à l’argumentation développée par la victime et ce, au visa du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit.
Comme le rappelle la Cour de cassation, l’inaptitude pour la victime à exercer une quelconque activité professionnelle ne se confond pas avec la perte de gains professionnels futurs mais est indemnisable au titre de l’incidence professionnelle qui peut réparer la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail.
Par conséquent, la victime était bien fondée à solliciter deux indemnisations, l’une au titre de ses pertes de gains professionnels futurs et l’autre au titre de son incidence professionnelle.