Indemnisation du préjudice moral de l’enfant à naître
A la suite d’un accident de la circulation survenu le 22 mai 2016, la conductrice à l’origine de de celui-ci a été déclarée coupable du délit d’homicide involontaire par conducteur de véhicule terrestre à moteur sous l’emprise d’un état alcoolique et de conduite d’un véhicule à vitesse excessive.
La victime étant décédée dans l’accident, son épouse s’est alors constituée partie civile en son nom personnel et en qualité de représentante légale de son fils, né après le décès de son père.
Statuant sur intérêts civils, le Tribunal Correctionnel a condamné la conductrice responsable à payer la somme de 10.000 euros à la veuve en qualité de représentante légale de son fils mineur, au titre du préjudice moral subi par ce dernier.
L’assureur de la conductrice, la GMF, a alors interjeté appel de cette décision.
Par arrêt en date du 25 octobre 2019, la Chambre des Appels Correctionnels de la Cour d’Appel de RENNES a confirmé le jugement rendu en première instance, raison pour laquelle l’assureur de la conductrice s’est alors pourvu en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de son pourvoi, la GMF soutient notamment que « l’enfant qui n’est pas encore conçu au moment de l’accident dont son père a été victime ne saurait obtenir par principe la réparation d’un préjudice moral par ricochet »
Toutefois, par arrêt en date du 10 novembre 2020 (Cour de cassation, Chambre criminelle, 10 novembre 2020, RG n°19-87136), la Cour de cassation a rejeté l’argumentation développée par la compagnie d’assurance et confirmé l’arrêt rendu en appel.
Pour ce faire, la Cour de cassation rappelle qu’un enfant peut, dès sa naissance, demander réparation du préjudice résultant du décès accidentel de son père, survenu alors qu’il était simplement conçu.
En l’espèce, l’enfant était bien conçu au moment du décès de son père, lequel est intervenu un mois et sept jours avant sa naissance.
Or, l’absence de son père sera toujours ressentie douloureusement par l’enfant qui devra se contenter des souvenirs de sa mère et de ceux de ses proches pour connaître son père et construire son identité.
L’enfant souffrira de l’absence définitive de son père qu’il ne connaîtra jamais.
Le préjudice moral de l’enfant était donc bien caractérisé, tout comme le lien de causalité entre le décès accidentel de son père et ce préjudice, raisons pour lesquelles une indemnisation pouvait bien lui être allouée.
Par conséquent, le préjudice moral de l’enfant simplement conçu et né après le décès de son père lié à une infraction pénale était bien réparable.