Etat de sidération et absence de consentement de la victime lors d’une agression sexuelle
Par ordonnance en date du 23 août 2019, un Juge d’Instruction a ordonné le renvoi d’un homme devant le Tribunal Correctionnel du chef d’agression sexuelle commise sur sa nièce.
Par jugement en date du 18 novembre 2021, le Tribunal Correctionnel a relaxé le prévenu.
Toutefois, par arrêt en date du 14 novembre 2023, la Cour d’Appel de RENNES l’a déclaré coupable d’agression sexuelle et l’a condamné à une peine de quatre ans d’emprisonnement dont deux ans avec sursis et a ordonné son inscription au FIJAS.
Il s’est alors pourvu en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de son pourvoi, il conteste toute agression sexuelle.
Pour ce faire, il rappelle que d’un point de vue intentionnelle, cette infraction suppose chez l’auteur la conscience de l’absence de consentement de la victime.
Or, il souligne qu’au cours de la procédure, sa nière a déclaré que « son oncle n’avait pas pu savoir qu’elle n’était pas consentante » en raison de son mutisme totale durant les faits.
Il allègue également que c’est sa nièce qui serait venue se coucher dans son lit et que celle-ci avait une attirance pour lui.
Au vu de ses éléments, il avait pu se méprendre sur les intentions de sa nièce, raison pour laquelle la Cour d’Appel de RENNES aurait dû rechercher s’il avait conscience de l’absence de consentement de sa nièce.
En n’ayant pas procédé à cette recherche, la Cour d’Appel de RENNES n’a pas caractérisé l’élément intentionnel du délit d’agression sexuelle.
Cependant, par arrêt en date du 11 septembre 2024 (Cour de cassation, Chambre criminelle, 11 septembre 2024, Pourvoi n°23-86657), la Cour de cassation a rejeté l’argumentation de l’auteur des faits et confirmé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de RENNES.
Pour ce faire, la Cour de cassation rappelle que le prévenu admet s’être livré à des attouchements sur les jambes, le sexe, la poitrine et le ventre de sa nièce mais soutient qu’elle était consentante.
Or, la victime a été constante dans ses déclarations en indiquant qu’elle dormait et avait été réveillée alors que son oncle lui touchait déjà le sexe, qu’elle avait ensuite été prise de sidération, évoquant un état de prostration et expliquant qu’elle n’avait pu ni bouger ni crier, comme si son corps ne lui appartenait plus et ne répondait plus, raison pour laquelle elle n’était pas parvenue à dire non et à repousser son agresseur.
Par ailleurs, l’Expert psychologue, selon lequel la victime a souffert d’un syndrome psycho-traumatique modéré, conclut que la personnalité de la jeune femme peut expliquer son absence de réaction pendant les faits.
De plus, la victime a toujours soutenu n’avoir jamais consenti ni participé aux faits.
En outre, le prévenu a reconnu qu’il avait pris l’initiative de toucher le corps de sa nièce, n’a pas contesté qu’elle était restée silencieuse et qu’elle ne l’avait pas touché ni embrassé, ce qui contredit son affirmation selon laquelle elle se serait montrée sexuellement active.
Le prévenu se serait confié auprès d’un tiers et lui aurait déclaré que sa nièce était restée comme une « poupée de chiffon » lors des faits.
Ensuite, au regard de leur lien familial et de leur différence d’âge, il est étonnant que le prévenu ne se soit pas assuré du consentement de sa nièce, surtout en constatant qu’elle ne prononçait aucun mot.
Concernant les témoignages laissant entendre que la jeune fille avait peut-être une attirance pour son oncle, il s’agit de suppositions, ce dernier convenant qu’il n’y avait jamais eu d’ambiguïté dans leurs relations antérieures.
Dans le courrier que le prévenu a adressé ensuite à la victime, il a écrit qu’il se sentait honteux, qu’elle-même n’avait rien à se reprocher, lui seul étant responsable, mais n’a précisé à aucun moment qu’elle était consentante, s’était déshabillée et avait été active lors des gestes qu’il avait pratiqués sur elle.
Au vu de l’ensemble de ses éléments, la Cour de cassation estime que le délit d’agression sexuelle est parfaitement caractérisé.
Le prévenu a bien agi par surprise en procédant à des attouchements sur la victime alors que celle-ci était endormie, puis en poursuivant ses gestes qui ont généré chez elle un état de sidération, qu’il a lui-même constaté, ce qui établi qu’il a agi en toute connaissance du défaut de consentement de cette dernière.