Contrat garantissant les risques décès et invalidité et clause de déchéance non-conforme aux dispositions du Code des Assurances
Au cours de l’année 1999, un gendarme a souscrit, auprès d’une compagnie d’assurances, un contrat garantissant les risques décès et invalidité.
Le 16 octobre 2005, dans l’exercice de ses fonctions, le gendarme a été victime de faits de violences volontaires ayant justifié une incapacité totale de travail d’un jour.
A partir de l’année 2008, il a fait l’objet de plusieurs arrêts de travail en raison d’un état de stress post-traumatique lié aux faits du 16 octobre 2005.
Il en a informé son assureur le 16 février 2009.
Le 26 mars 2013, il a été définitivement réformé en raison d’une infirmité imputable au service.
Le 4 avril 2016, il a assigné son assureur en exécution du contrat et ce, afin d’obtenir le paiement du capital dû pour l’invalidité totale et définitive (ITD) prévue en cas d’accident.
Par arrêt en date du 15 décembre 2022, la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE a condamné l’assureur à verser à son assuré la somme de 354.330,20 euros au titre de la garantie ITD résultant du « contrat de carrière », avec intérêts au taux légal et capitalisation par année échue à compter du 21 février 2013.
L’assureur s’est alors pourvu en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de son pourvoi, il soutient notamment que la clause stipulée dans un contrat d’assurance, qui définitif les conditions de garantie, s’impose aux parties.
Or, l’article 13.2.1 des conditions générales n°04/01 de la police d’assurance invalidité « contrat de carrière », souscrite par le gendarme, prévoyait que « le capital accident n’est versé que si la reconnaissance de votre état fait suite à une demande d’ITD par accident formulée expressément dans les 24 mois qui suivent le jour de l’accident ».
L’accident avait eu lieu le 16 octobre 2005 et le gendarme n’avait déclaré son sinistre à l’assurance que le 16 février 2009.
Le gendarme n’avait donc pas respecté les stipulations contractuelles.
Cependant, par arrêt en date du 7 novembre 2024 (Cour de cassation, Civile 2ème, 7 novembre 2024, Pourvoi n°23-10992), la Cour de cassation n’a pas fait droit à l’argumentation développée par la compagnie d’assurances et confirmé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE.
Selon la Cour de cassation, il résulte de l’article L.113-2, 4°, du Code des Assurances, déclaré d’ordre public par l’article L.111-2 de ce même code, que le délai imparti à l’assuré pour donner avis à l’assureur de tout sinistre de nature à entraîner la garantie de celui-ci a pour point de départ la connaissance du sinistre par l’assuré, c’est-à-dire la connaissance à la fois de l’évènement et des conséquences dommageables de nature à entraîner la garantie de l’assureur.
Il s’en déduit que l’assureur ne peut opposer à l’assuré une déchéance pour déclaration tardive lorsque la clause la prévoyant n’est pas conforme à ces dispositions.
Or, la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE a constaté que les conditions générales du contrat prévoyaient une clause selon laquelle « le capital accident n’est versé que si la reconnaissance de votre état fait suite à une demande d’ITD par accident formulée expressément dans les 24 mois qui suivent le jour de l’accident ».
Selon la Cour de cassation, cette clause instaure non une condition de la garantie mais une déchéance de garantie, soumise aux dispositions de l’article L.113-2, 4°, du Code des Assurances.
En ce qu’elle impose à l’assuré un délai de 24 mois qui suit le jour de l’accident pour former une demande de garantie, indépendamment de la connaissance par l’intéressé des conséquences dommageables de nature à entraîner la garantie de l’assureur, cette clause n’est pas conforme aux dispositions précitées et est inopposable à l’assuré.
Le gendarme était donc bien fondé à solliciter l’indemnisation de son préjudice auprès de son assureur.