Condamnation possible d’un établissement de santé à payer à l’ONIAM la pénalité de l’article L.1142-15 alinéa 5 du Code de la Santé Publique en lieu et place de son assureur
Après avoir été opérée, le 15 novembre 2005, d’un syndrome du canal carpien au sein de la Clinique des Dames Blanches, une patiente a présenté une infection.
La victime a alors saisi la Commission de Conciliation et d’Indemnisation des Accidents Médicaux (la CCI) territorialement compétente.
Par avis en date du 30 septembre 2010, la CCI a estimé que la patiente avait bien contracté une infection nosocomiale engageant la responsabilité de plein droit de la Clinique des Dames Blanches et que la réparation de ses préjudices incombait à l’assureur du Pôle Santé Léonard de Vinci (l’établissement de santé), venant aux droits de la Clinique.
Toutefois, l’assureur de l’établissement n’a adressé aucune offre d’indemnisation à la victime dans le délai de 4 mois qui lui était imparti.
Saisi par la victime, l’Office Nationale d’Indemnisation des Accidents Médicaux, des Affections Iatrogènes et des Infections Nosocomiales (l’ONIAM) lui a fait une offre d’indemnisation partielle qu’elle a acceptée le 25 octobre 2011.
Le 29 novembre 2011, la patiente victime a ensuite assigné l’établissement de santé en indemnisation de ses préjudices complémentaires et mis en cause la Caisse Primaire d’Assurance Maladie d’INDRE-ET-LOIRE.
Après avoir accepté, le 5 février 2013, une offre d’indemnisation complémentaire de l’ONIAM, la victime s’est désistée de ses demandes à l’encontre de l’établissement de santé.
Subrogé dans les droits de la victime, l’ONIAM est intervenu volontairement à l’instance et a sollicité, d’une part le remboursement des sommes versées à la patiente et, d’autre part le paiement de l’indemnité prévue à l’article L.1142-15 alinéa 5 du Code de la Santé Publique et des frais d’expertise.
Par arrêt en date du 8 juin 2020, la Cour d’Appel d’ORLEANS a fait droit aux demandes de l’ONIAM, l’établissement de santé étant notamment condamné à verser la somme de 7.520,15 euros au titre de l’indemnité prévue à l’article L.1142-15 alinéa 5 du Code de la Santé Publique.
Ce dernier s’est pourvu en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de son pourvoi, il soutient qu’en application de l’article L.1142-15 alinéa 5 du Code de la Santé Publique, seul l’assureur qui s’est abstenu, par négligence ou délibérément, de faire une offre dans le délai de 4 mois peut être condamné à verser à l’ONIAM la pénalité prévue.
A contrario, l’établissement de santé ne saurait être condamné à payer cette pénalité en lieu et place de son assureur.
Toutefois, par arrêt en date du 16 février 2022 (Cour de cassation, Civile 1ère, 16 février 2022, Pourvoi n°20-19333), la Cour de cassation a rejeté l’argumentation développée par l’établissement de santé et confirmé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel d’ORLEANS.
Comme le rappelle la Cour de cassation, aux termes de l’article L.1142-14 alinéa 1 du Code de la Santé Publique, lorsque la CCI estime qu’un dommage engage la responsabilité d’un professionnel de santé, d’un établissement de santé, d’un service de santé, d’un organisme mentionné à l’article L.1142-1 ou d’un producteur d’un produit de santé, l’assureur qui garantit la responsabilité civile ou administrative de la personne considérée comme responsable par la commission adresse à la victime ou à ses ayants droit, dans un délai de 4 mois suivant la réception de l’avis, une offre d’indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis dans la limite des plafonds de garantie des contrats d’assurance.
Elle ajoute qu’aux termes de l’article L.1142-15 alinéa 5 du même Code, en cas de silence ou de refus explicite de la part de l’assureur de faire une offre, ou lorsque le responsable des dommages n’est pas assuré, le juge saisi dans le cadre de la subrogation, condamne, le cas échéant, l’assureur ou le responsable à verser à l’ONIAM une somme au plus égale à 15% de l’indemnité qu’il alloue.
La Cour de cassation précise qu’il s’en déduit que, si le paiement de cette somme doit, en principe, être supporté par l’assureur n’ayant pas présenté d’offre d’indemnisation, il incombe à l’établissement de santé dans le cas où celui-ci n’a pas mis en cause son assureur dans la procédure contentieuse.
Dès lors que la Cour d’Appel a constaté qu’aucune offre d’indemnisation n’avait été présentée à la patiente victime à la suite de l’avis de la CCI en date du 30 septembre 2010, par l’assureur de l’établissement de santé ou par celui-ci et que l’établissement de santé n’avait pas attrait à l’instance son assureur, c’est à bon droit qu’elle a condamné l’établissement de santé à payer à l’ONIAM 15% de l’indemnité allouée.
Par conséquent, un établissement de santé peut parfaitement être condamné à payer l’indemnité prévue l’article L.1142-15 alinéa 5 du Code de la Santé Publique en lieu et place de son assureur.