Condamnation d’un établissement public de santé pour non-respect des délais d’inhumation d’un enfant né sans vie et du droit à l’information des parents

Publié le 27/11/23

Le 7 août 2013, une femme a accouché d’un enfant sans vie au sein du Centre Hospitalier Départemental de VENDEE.

Le 13 août 2013, l’établissement public de santé a organisé la crémation du corps de l’enfant au sein du Centre de Crémation de la Commune de la ROCHE-SUR-YON.

Par courrier en date du 2 août 2018, la mère a adressé au Centre Hospitalier Départemental de VENDEE une réclamation préalable tendant à l’indemnisation du préjudice moral qu’elle a subi du fait de la faute commise par l’établissement public de santé dans la prise en charge du corps de son enfant.

En effet, la patiente reproche, d’une part à l’hôpital de ne pas l’avoir informée du délai dont elle disposait pour réclamer le corps de son enfant afin de procéder, elle-même, à ses obsèques et, d’autre part d’avoir procédé à sa crémation avant l’expiration du délai prévu par les textes. 

En l’absence de réponse du Centre Hospitalier Départemental de VENDEE, elle a saisi le Tribunal Administratif de NANTES afin de solliciter la condamnation de l’établissement public de santé à lui verser la somme de 50.000 euros en réparation des préjudices subis.

Par jugement en date du 21 juillet 2021, le Tribunal Administratif de NANTES a rejeté sa demande.

Par arrête en date du 1er juillet 2022, la Cour Administrative d’Appel de NANTES a rejeté son appel considérant que la patiente et son conjoint avaient donné, dès le 8 août 2013, leur accord pour que le Centre Hospitalier Départemental de VENDEE prenne en charge le corps de l’enfant et qu’aucun texte ne prévoyait l’obligation de leur délivrer une information sur la procédure.

La patiente s’est alors pourvue en cassation à l’encontre de cette décision.

Or, par arrêt en date du 29 septembre 2023 (Conseil d’Etat, 5ème et 6ème Chambres Réunies, N°468220), le Conseil d’Etat a fait droit à l’argumentation développée par la mère et censuré l’arrêt rendu par la Cour Administrative d’Appel de NANTES et ce, en application des articles R.1112-75 et suivants du Code de la Santé Publique.

Comme le rappelle le Conseil d’Etat, les parents d’un enfant pouvant être déclaré sans vie à l’état civil disposent d’un délai de 10 jours, ou, lorsque des prélèvements sont effectués sur le corps de l’enfant, de ce délai prorogé conformément aux dispositions du III de l’article R.1112-76 du Code de la Santé Publique, pour faire le choix de réclamer le corps de cet enfant.

Pour l’application de ces dispositions, l’établissement de santé est tenu, d’une part, de conserver le corps de l’enfant pendant la totalité de cette durée, y compris lorsque le père et la mère ont exprimé avant son terme leur accord pour confier au centre hospitalier le soin de procéder aux opérations funéraires.

Il lui appartient, d’autre part, de délivrer aux parents une information complète et appropriée leur permettant d’exercer dans le délai qui leur est imparti le choix qui leur appartient.

A ce titre, le centre hospitalier doit porter à leur connaissance l’existence de ce délai et les conditions dans lesquelles le corps sera pris en charge s’ils ne le réclament pas.

Dès lors, en jugeant que le Centre Hospitalier Départemental de VENDEE, qui avait procédé à la crémation du corps de l’enfant avant l’expiration du délai de 10 jours prévu par l’article R.1112-75 du Code de la Santé Publique et n’avait pas donné aux parents l’information requise, n’avait pas commis de faute, la Cour Administrative d’Appel de NANTES a, selon le Conseil d’Etat, commis une double erreur de droit. 

Par conséquent, la patiente est donc bien fondée à solliciter l’annulation de l’arrêt rendu par la Cour Administrative d’Appel de NANTES.

Par ailleurs, le Conseil d’Etat poursuit en soulignant que l’établissement public de santé a commis des fautes dans l’organisation du service de nature à engager sa responsabilité.

De plus, est sans incidence la circonstance que les parents ont signé, lors de leur sortie de la maternité le lendemain de l’accouchement, un formulaire qui ferait apparaitre, selon le centre hospitalier, leur intention de lui confier le soin de procéder aux opérations funéraires.

En effet, la patiente et son époux n’ont pas été mis en mesure d’exercer, de façon éclairée, le droit qui était le leur d’organiser eux-mêmes les funérailles de leur enfant.

Contrairement à ce que soutient le Centre Hospitalier Départemental de VENDEE, il ne résulte pas de l’instruction que, correctement informés, les intéressés n’auraient pas entendu, dans le délai réglementaire de 10 jours dont ils disposaient, réclamer le corps de leur enfant.

Selon le Conseil d’Etat, il sera fait une juste appréciation dans les circonstances de l’espèce du préjudice moral de la mère en condamnant le Centre Hospitalier Départemental de VENDEE à lui verser une somme de 4.000 euros. 

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