Chute d’un tiers dans une résidence et responsabilité du fait des choses
Le 7 mars 2013, une femme est allée, en voiture, déposer sa petite-fille chez son assistante maternelle, domiciliée Résidence Le Domaine des Chênes à MOUGINS, dans les Alpes-Maritimes.
Arrivée sur place, elle est descendue de sa voiture pour accéder au digicode posé sur la porte piétons.
Après avoir contourné son véhicule, elle a glissé et chuté devant le portail d’entrée de la résidence.
Victime d’une double fracture du tibia et du péroné, elle a saisi le Tribunal Judiciaire de GRASSE afin de solliciter la condamnation de l’ASL Domaine des Chênes à l’indemniser de ses préjudices sur le fondement de la responsabilité du fait des choses.
Par jugement en date du 17 décembre 2019, le Tribunal Judiciaire de GRASSE a débouté la victime de l’intégralité de ses demandes.
Par déclaration en date du 28 janvier 2020, cette dernière a interjeté appel de cette décision.
Or, par arrêt en date du 22 avril 2021 (Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE, Chambre 1-6, 22 avril 2021, RG n°20/01420), la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE a fait droit à l’argumentation développée par la victime et infirmé le jugement rendu en première instance.
Comme le rappelle la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE, l’article 1242 alinéa 1er du Code civil institue une responsabilité de plein droit, objective et étrangère à toute notion de faute, qui incombe au gardien de la chose intervenue dans la réalisation du dommage, sauf à prouver qu’il n’a fait que subir l’action d’une cause étrangère, le fait d’un tiers imprévisible et irrésistible ou la faute de la victime.
Lorsque la chose est par nature immobile, la preuve qu’elle a participé de façon incontestable et déterminante à la production du préjudice incombe à la victime qui doit démontrer que la chose, malgré son inertie, a eu un rôle causal et a été l’instrument du dommage par une anormalité dans son fonctionnement, son état, sa fabrication, sa solidité ou sa position.
En l’espèce, l’ASL Domaine des Chênes n’a jamais contesté avoir l’usage, le contrôle et la direction de la voie d’accès desservant la résidence depuis la voie publique, ce qui fait d’elle le gardien de la chose.
Par ailleurs, il ressort des attestations et des pièces médicales produites par la victime que celle-ci a bien chuté au pied du portail d’accès à la résidence, chute à l’origine de sa double fracture du tibia et du péroné.
En outre, la victime communique deux procès-verbaux de constat d’Huissiers de Justice, lesquels mettent en évidence la forte déclivité de la voie d’accès à la résidence.
Enfin, il apparait que le jour de la chute une pluviométrie élevée a été constatée dans la matinée dans la région de NICE.
Or, réalisé par temps de pluie, l’un des deux constats d’Huissiers de Justice précise que l’accès piéton vers le digicode s’effectue sur une chaussée pavée, d’aspect glissant par temps de pluie.
Par conséquent, selon la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE, « la conjonction de la déclivité de la voie d’accès et de la pluie ont ainsi créé l’anormalité de la chose le matin du 7 mars 2013 ».
Le sol permettant d’accéder à la résidence étant anormalement glissant le jour de la chute, la responsabilité de l’ASL Domaine des Chênes est engagée et cette dernière sera tenue d’indemniser l’intégralité des préjudices subis par la victime, dès lors que celle-ci n’a commis aucune faute.
Pour ce faire, la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE ordonne, avant dire droit, l’organisation d’une mesure d’expertise médicale ayant pour objet d’évaluer l’ensemble des préjudices de la victime en lien avec l’accident du 7 mars 2013, outre le versement d’une provision d’un montant de 5.000 euros à valoir sur son indemnisation définitive.