Chute d’un locataire dans les parties communes d’un immeuble et responsabilité du propriétaire
Le 13 mai 2014, le locataire d’un appartement a fait une chute dans les parties communes d’un immeuble appartenant à une société civile immobilière (la SCI).
Alors qu’il rentrait dans le hall, il a trébuché et chuté sur des tôles ondulées et des morceaux de bois remplis de clous qui avaient été déposés par des ouvriers dans un espace non éclairé.
Prise en charge au sein du Service des Urgences de l’Hôpital la Conception à MARSEILLE, la victime s’est vue diagnostiquer une atteinte à l’épaule gauche et des contusions lombaire et cervicale.
Le 16 décembre 2014, la victime a subi une intervention chirurgicale pour une acromioplastie de l’épaule gauche en raison d’un syndrome douloureux de la coiffe des rotateurs résistant à un traitement médical.
Par ailleurs, de nombreuses séances ont été nécessaires pour sa rééducation.
C’est dans ce contexte que par actes en dates des 22 et 24 juillet 2015, le locataire a fait assigner la SCI et son assureur, la société AXA France IARD, devant le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE afin d’obtenir l’indemnisation de ses préjudices et, au préalable, pour obtenir la désignation d’un expert ayant pour mission d’évaluer les conséquences médico-légales de sa chute dans les parties communes de l’immeuble.
Par jugement en date du 4 janvier 2019, le Tribunal de Grande Instance de MARSEILLE a rejeté l’ensemble des demandes de la victime, laquelle a interjeté appel.
Par arrêt en date du 21 janvier 2021 (Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE, 21 janvier 2021, RG n°19/03576), la Cour d’appel d’AIX-EN-PROVENCE a fait droit à l’argumentation développée par le locataire victime et infirmé le jugement rendu en première instance.
En effet, comme le souligne la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE, la matérialité de la chute du locataire dans les parties communes de l’immeuble appartenant à la SCI n’est pas discutée et ce, d’autant qu’elle est corroborée par différents témoignages.
Elle ajoute que la SCI est l’unique propriétaire des logements situés dans l’immeuble, ce qu’elle ne conteste pas.
En outre, il n’est pas sérieusement contestable que la victime était bien locataire de la SCI et que cette dernière était bien son bailleur au moment où la chute s’est produite.
La Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE poursuit en précisant que la condamnation du bailleur à réparer le préjudice corporel subi par le locataire à la suite d’un accident dans les parties communes d’un immeuble implique que soit caractérisée l’existence d’un vice ou d’un défaut empêchant l’usage par le preneur de la chose louée ou de nature à faire obstacle à sa jouissance paisible.
En vertu de l’article 1721 du Code civil, il est dû garantie au preneur pour tous les vices ou défauts de la chose louée qui empêchent l’usage, quand même le bailleur ne les aurait pas connus lors du bail.
S’il résulte de ces vices ou défauts quelque perte pour le preneur, le bailleur est tenu de l’indemniser.
Par ailleurs, la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE expose que l’article 6 b) de la loi du 6 juillet 1989 met à la charge du bailleur l’obligation d’assurer au locataire la jouissance paisible du logement et, sans préjudice des dispositions de l’article 1721 du Code civil, de le garantir des vices et défauts de nature à y faire obstacle hormis ceux qui, consignés dans l’état des lieux, auraient fait l’objet de la clause expresse mentionnée au a).
C’est donc à bon droit que le locataire victime vient rechercher la responsabilité de la SCI, propriétaire de l’immeuble, et de son assureur.
En outre, les griefs tendant à l’encombrement fautif des parties communes et au défaut d’éclairage sont établis par la victime qui produit plusieurs attestations.
Ces attestations confirment qu’au jour de la chute, le hall de l’immeuble, partie commune, était dépourvu d’éclairage et encombré depuis plusieurs semaines de gravats et tôles ondulées en provenance de travaux réalisés dans un magasin proche de l’immeuble, ce qui caractérise des défauts de la chose louée imputables au propriétaire-bailleur des lieux et un manquement à l’obligation dont il est débiteur à l’égard de ses locataires d’une jouissance paisible.
Or, selon la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE, ces manquements sont à l’origine directe et certaine de la chute dont le locataire a été victime et engagent la responsabilité de la SCI, propriétaire de l’immeuble.
Par conséquent, la SCI et son assureur seront tenus d’indemniser intégralement les préjudices subis par la victime.
Pour ce faire, la Cour d’Appel d’AIX-EN-PROVENCE fait droit à la demande d’expertise judiciaire formulée par la victime, ayant pour objet d’évaluer les conséquences médico-légales de la chute dont il a été victime le 13 mai 2014.
Enfin, la SCI et son assureur sont également condamnés à verser à la victime une provision d’un montant de 3.000 euros à valoir sur l’indemnisation définitive de ses préjudices, outre une somme de 1.500 euros au titre de ses frais irrépétibles.