Affirmation du principe de la non-imputation de la rente accident du travail sur les pertes de gains professionnels actuel
Le 7 juillet 2012, une salariée a été victime, à son travail, d’une tentative de vol aggravé.
Dans les suites de cette infraction, elle a saisi la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infractions territorialement compétente (la CIVI) d’une demande d’indemnisation de ses préjudices, se prévalant, pour ce faire, d’une expertise médicale ordonnée par le Tribunal correctionnel ayant notamment fixé la consolidation de ses blessures au 7 janvier 2014.
Par arrêt en date du 10 septembre 2019, la Cour d’Appel de RIOM a cependant débouté la victime de sa demande d’indemnisation au titre des pertes de gains professionnels actuels.
La Cour d’Appel de RIOM considère en effet qu’aucune perte de salaires n’était démontrée dans la mesure où la victime avait commencé à percevoir, à compter du 24 novembre 2012, soit avant la consolidation de son état de santé, une rente accident du travail.
Selon la Cour d’Appel de RIOM, cette rente accident du travail devait s’imputer sur les pertes de gains professionnels actuels allégués par la victime.
En effet, l’application du principe de la réparation intégrale interdirait à la victime de cumuler les prestations servies avec les indemnités mises à la charge du responsable du dommage.
La salariée victime s’est donc pourvue en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de son pourvoi, elle soutient que la rente accident du travail concourt à l’indemnisation des pertes de gains professionnels futurs, de l’incidence professionnelle et, le cas échéant, du déficit fonctionnel permanent et s’impute uniquement sur ces trois postes de préjudices.
En imputant la rente accident du travail sur les pertes de gains professionnels actuels, la Cour d’Appel de RIOM aurait violé, selon elle, les dispositions des articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, les articles L.434-1, L.434-2 et L.461-1 du Code de la Sécurité Sociale ainsi que le principe de la réparation intégrale du préjudice.
Par arrêt en date du 14 octobre 2021 (Cour de cassation, Civile 2ème, 14 octobre 2021, RG n°19-24456), la Cour de cassation a fait droit à l’argumentation développée par la victime et censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de RIOM.
Comme le rappelle la Cour de cassation, le juge, après avoir fixé l’étendue du préjudice résultant des atteintes à la personne et évalué celui-ci indépendamment des prestations indemnitaires qui sont versées à la victime, ouvrant droit à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ou son assureur, doit procéder à l’imputation de ces prestations, poste par poste.
Or, la rente versée à la victime d’un accident du travail indemnise, d’une part, les pertes de gains professionnels futurs et l’incidence professionnelle de l’incapacité et, d’autre part, le déficit fonctionnel permanent.
Par conséquent, cette rente accident du travail, qui répare un préjudice permanent, ne peut pas s’imputer sur les pertes de gains professionnels actuels et ce, quand bien même son versement aurait commencé avant la date de consolidation retenue par le juge.
La Cour de cassation affirme donc le principe de la non-imputation de la rente accident du travail sur le poste « pertes de gains professionnels actuels » ; cette rente ne peut donc s’imputer que sur les postes « pertes de gains professionnels futurs », « incidence professionnelle » et « déficit fonctionnel permanent ».