Accident de la circulation : Condamnation d’une compagnie d’assurance au doublement des intérêts pour des postes de préjudices réservés

Accident de la circulation : Condamnation d’une compagnie d’assurance au doublement des intérêts pour des postes de préjudices réservés
Publié le 11/04/22

A la suite d’un accident de la circulation impliquant un véhicule assuré auprès de la MMA IARD Assurances Mutuelles, un homme a été gravement blessé.

Après deux expertises ordonnées en référé les 29 juin 2005 et 27 juillet 2007, ayant conclu à une consolidation de son état de santé au 22 mai 2007 et à l’existence d’un déficit fonctionnel permanent de 80%, la victime, ses deux parents et son frère ont assigné la compagnie d’assurance en réparation de leurs préjudices, en présence de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Isère. 

Le 18 mars 2011, la compagnie d’assurance a adressé une offre d’indemnisation à la victime ne portant pas sur tous les postes de préjudices ; les postes de « pertes de gains professionnels futurs » et « d’incidence professionnelle » étaient notamment indiqués comme réservés. 

Par arrêt en date du 7 novembre 2019, rendu sur renvoi après cassation, la Cour d’Appel de CHAMBERY a notamment condamné la compagnie d’assurance à payer à la victime un intérêt au double du taux légal sur la somme de 1.036.317,30 euros entre le 10 mars 2005 et le 2 mai 2011.

La victime a, en revanche, été déboutée de sa demande tendant au paiement par l’assureur d’un intérêt au double du taux légal sur la somme de 3.917.752,38 euros pour la période du 10 mars 2005 au 26 septembre 2017, outre capitalisation. 

Pour ce faire, la Cour d’Appel de CHAMBERY a considéré que la compagnie d’assurance avait bien fait une offre auprès de la victime le 18 mars 2011, reçue le 2 mai suivant.

Même si elle comportait certains postes réservés par la compagnie d’assurances dans l’attente de justificatifs, cette offre de la compagnie d’assurances ne pouvait être considérée comme incomplète, raison pour laquelle le doublement des intérêts devait être interrompu à la date du 2 mai 2011. 

La victime s’est alors pourvue en cassation à l’encontre de cette décision. 

Aux termes de son pourvoi, elle rappelle qu’une offre d’indemnité doit comprendre tous les éléments indemnisables du préjudice ; qu’une offre incomplète équivaut à une absence d’offre.

En fixant la date d’arrêt du cours des intérêts doublés à la date de réception de l’offre d’indemnisation de l’assureur du 18 mars 2011, après avoir pourtant constaté que certains postes de préjudices y étaient réservés dans l’attente de justificatifs, à savoir les « dépenses de santé actuelles et futures », « les frais de logement adapté », ainsi que « les pertes de gains professionnels futurs » et « l’incidence professionnelle », la Cour a violé les articles L.211-9 et L.211-13 du Code des Assurances. 

Par ailleurs, en s’abstenant de rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si l’existence des chefs de préjudices dont l’évaluation avait été réservée par l’assureur dans son offre d’indemnisation du 18 mars 2011 n’était pas d’ores et déjà certaine à la date de cette offre, la Cour d’Appel a privé sa décision de base légale aux regard des articles précités. 

Aux termes de son arrêt en date du 20 janvier 2022 (Cour de cassation, Civile 2ème, 20 janvier 2022, Pourvoi n°20-15406), la Cour de cassation a fait droit à l’argumentation développée par la victime et censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de CHAMBERY.

Comme le rappelle la Cour de cassation, il résulte des articles L.211-9 et L.211-13 du Code des Assurances que l’assureur qui garantit la responsabilité du conducteur d’un véhicule impliqué dans un accident de la circulation est tenu de présenter à la victime, dans les délais impartis, une offre d’indemnité qui doit comprendre tous les éléments indemnisables du préjudice. L’offre incomplète équivaut à l’absence d’offre. Lorsque l’offre n’a pas été faite dans les délais impartis par le premier de ces textes, le montant de l’indemnité offert par l’assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit, au double du taux de l’intérêt légal, à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif. 

Or, selon la Cour de cassation, l’offre de la MMA IARD Assurances Mutuelles, qui faisait état de postes de préjudices réservés, « ne comprenait pas tous les éléments indemnisables du préjudice » de la victime. 

Par conséquent, l’offre adressée par cette dernière le 18 mars 2011 et reçue par la victime le 2 mai suivant n’a pas interrompu le doublement des intérêts, lesquels ont continué de courir. 

La compagnie MMA IARD Assurances Mutuelles devra donc régler à la victime des intérêts au double du taux légal au-delà de la date du 2 mai 2011.  

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