Doublement des intérêts en cas de retard de l’offre d’indemnisation définitive formulée par la compagnie d’assurance

Actualité Tondu Avocat Doublement des intérêts en cas de retard de l’offre d’indemnisation définitive formulée par la compagnie d’assurance
Publié le 8/03/21

La loi n°85-677 du 5 juillet 1985, applicable en matière d’accidents de la circulation, poursuit un double objectif : d’une part l’amélioration de la situation des victimes et, d’autre part l’accélération des procédures d’indemnisation.

Pour ce faire, la loi du 5 juillet 1985, mais également les articles L.211-1 et suivants du Code des Assurances, tentent d’organiser les conditions d’un règlement amiable et rapide de l’indemnisation des victimes. 

Pour que les intérêts des victimes d’accidents de la circulation soient garantis au mieux dans le cadre de ce processus amiable, les dispositions précitées mais également la jurisprudence sont venues préciser les règles devant être respectées par les compagnies d’assurance, qu’il s’agisse de l’information précontractuelle, du formalisme, du contenu et des délais dans lesquels doit intervenir l’offre d’indemnisation.

Par un arrêt en date du 26 novembre 2020 (Cour de Cassation, Civile 2ème, 26 novembre 2020, Pourvoi n°19-16016), la Cour de cassation est venue rappeler l’une des règles relatives aux conditions de délais imposées aux compagnies d’assurance. 

En l’espèce, le 4 mai 2012, une personne qui marchait sur un trottoir a été heurtée par un véhicule assuré auprès de la MAIF. 

La compagnie d’assurance a alors mandaté un médecin conseil afin d’évaluer les préjudices de la victime, lequel a déposé son rapport définitif le 11 juillet 2013. 

Aux termes de ce rapport, le médecin conseil mandaté par la MAIF a notamment consolidé l’état de santé de la victime au 4 mai 2013.

Toutefois, par lettre en date du 26 août 2013 adressée à la compagnie d’assurance, la victime a contesté les éléments de ce rapport, en particulier la date de consolidation de son état de santé. 

En raison de ces contestations, la MAIF n’a pas adressé d’offre d’indemnisation définitive à la victime. 

Saisi à l’initiative de cette dernière, le Juge des Référés a ordonné une expertise judiciaire ayant pour objet d’évaluer les préjudices de celle-ci. 

L’Expert Judiciaire a déposé son rapport définitif le 6 août 2015 aux termes duquel il fixait une date de consolidation différente de celle du médecin conseil de la compagnie d’assurance. 

Par actes en date des 25 et 30 mai 2016, la victime a assigné la MAIF en indemnisation de ses préjudices, en présence de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Isère. 

Par arrêt de la Cour d’Appel de GRENOBLE en date du 19 février 2019, la victime a obtenu la réparation d’un certain nombre de postes de préjudices. 

Cependant, la Cour d’Appel de GRENOBLE a notamment rejeté sa demande relative au doublement des intérêts au tau légal. 

En effet, la victime soutenait que la MAIF était tenue de lui faire une offre définitive d’indemnisation dans les cinq mois suivants la date à laquelle elle avait été informée de la consolidation de son état de santé au 4 mai 2013.

Le fait que la victime ait contesté les conclusions du médecin conseil de la compagnie d’assurance ne dispensait pas, selon elle, la MAIF de son obligation de faire une offre dans le délai de 5 mois imposé par les articles L.211-9 et L.211-13 du Code des Assurances. 

Ne l’ayant pas fait, la Cour d’Appel de GRENOBLE devait doubler les intérêts au taux légal en raison du caractère tardif de l’offre faite par la MAIF. 

Toutefois, aux termes de son arrêt en date du 19 février 2019, la Cour d’Appel de GRENOBLE n’a pas fait droit à l’argumentation développée par la victime.

Pour rejeter la demande de doublement du taux de l’intérêt légal, la Cour d’Appel de GRENOBLE a retenu que si la consolidation avait été fixée au 4 mai 2013 par le médecin conseil de la MAIF dans son rapport en date du 11 juillet 2013, la victime avait néanmoins contesté les éléments de ce rapport par lettre du 26 août 2013 adressée à l’assureur qui lui a proposé, à sa demande, de faire réaliser une seconde expertise amiable, ce à quoi la victime n’a pas donné suite et a conduit à la désignation, en référé, d’un Expert Judiciaire qui a fixé une date de consolidation différente de celle du 4 mai 2013 dans son rapport définitif du 6 août 2015.

Selon la Cour d’Appel de GRENOBLE, le délai de 5 mois imposé par l’article L.211-9 du Code des Assurances n’a commencé à courir que du jour où la MAIF a eu connaissance du rapport de l’Expert Judiciaire.

Or, la compagnie d’assurance a adressé, le 28 septembre 2015, une offre définitive d’indemnisation à la victime, soit dans le délai de 5 mois imposé par l’article précité, qui n’était manifestement pas insuffisante ni dérisoire. 

Par conséquent, selon la Cour d’Appel de GRENOBLE, la victime était mal fondée à solliciter le doublement du taux d’intérêt légal en l’absence d’offre tardive. 

Cette dernière a néanmoins formé un pourvoi en cassation. 

Par arrêt en date du 26 novembre 2019 (Cour de cassation, Civile 2ème, 26 novembre 2019, Pourvoi n°19-16.016), la Cour de cassation a fait droit à l’argumentation développée par la victime et censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de GRENOBLE au visa des articles L.211-9 et L.211-13 du Code des Assurances. 

Comme le rappelle la Cour de cassation, lorsque l’offre définitive, qui doit comprendre tous les éléments indemnisables du préjudice, n’a pas été faite dans le délai de cinq mois suivant la date à laquelle l’assureur a été informé de la consolidation, le montant de l’indemnité offerte pas l’assureur ou allouée par le juge à la victime produit intérêts de plein droit au double du taux de l’intérêt légal, à compter de l’expiration du délai et jusqu’au jour de l’offre ou du jugement devenu définitif. 

Selon la Cour de cassation, le fait que la victime ait contesté les conclusions du médecin conseil mandaté par la compagnie d’assurance, notamment la date de consolidation de son état de santé, était indifférent et ne dispensait pas l’assureur de faire une offre d’indemnisation. 

La MAIF aurait donc dû faire une offre définitive d’indemnisation dans le délai de 5 mois à compter de la date à laquelle elle a été informée de la consolidation de l’état de santé de la victime dans le rapport en date du 11 juillet 2013 et ce, quand bien même la victime contestait les conclusions de ce rapport. 

Les contestations formulées par les victimes n’exonèrent donc pas les compagnies d’assurances de formuler leurs offres définitives d’indemnisation dans les délais imparties par l’article L.211-9 du Code des Assurances.

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