Caractérisation de l’élément matériel du délit d’agression sexuelle sur mineur
Un mineur âgé de 14 ans au moment des faits, d’origine serbe et isolé sur le territoire français à la suite de l’expulsion de sa mère, a rejoint par ses propres moyens le domicile de son oncle situé à BEZIERS, avant d’être placé sous la protection de l’Aide Sociale à l’Enfance et d’être hébergé dans un foyer.
Dans le courant de l’année 2013, alors qu’il se promenait avec son oncle et les enfants de ce dernier dans un parc, l’adolescent a fait la connaissance d’un homme âgé de 48 ans.
Ce dernier a proposé au mineur de 14 ans d’avoir des relations sexuelles avec lui, ce que l’adolescent a refusé.
Un mois plus tard, alors qu’il se promenait à vélo, l’adolescent a recroisé le même homme qui l’a invité de nouveau chez lui et lui a proposé, contre rémunération, d’avoir des relations sexuelles.
L’homme lui a alors touché le sexe à travers le pantalon, lui a pratiqué une fellation avant de lui demander de le sodomiser et lui a remis la somme de 10 euros.
Selon les déclarations du mineur, ces faits se sont reproduits à quatre reprises.
L’homme, après avoir contesté formellement les faits reprochés, a reconnu leur matérialité, soutenant toutefois que le mineur était à chaque fois à l’initiative des relations intervenues, à l’issue desquelles il niait lui avoir remis de l’argent.
C’est dans ce contexte que l’homme de 48 ans a été cité devant le Tribunal Correctionnel pour avoir, notamment entre le 8 novembre 2012 et le 1er janvier 2014, commis ou tenté de commettre des atteintes sexuelles avec violence, contrainte, menace ou surprise sur la personne du mineur et ce, en état de récidive légale dans la mesure où il avait été condamné de façon définitive, le 28 octobre 1999 par la Cour d’Assises du VAR pour un crime.
Comme le rappelle l’article 222-22 du Code pénal :
« Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise ».
Le Tribunal Correctionnel l’a alors déclaré coupable et a prononcé une peine.
Tant le prévenu que le Ministère Public ont interjeté appel de cette décision.
Par arrêt en date du 7 juin 2018, la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de MONTPELLIER a condamné de nouveau le prévenu pour agressions sexuelles et corruption de mineur en récidive à douze ans d’emprisonnement, dix ans de suivi socio-judiciaire et a prononcé les intérêts civils.
Pour ce faire, elle souligne que le mineur avait éprouvé un sentiment de peur à l’égard du prévenu.
Selon la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de MONTPELLIER, la contrainte à l’égard du mineur était bien caractérisée en l’espèce et résultait « d’une part de la différence d’âge existant entre le prévenu, âgé de 48 ans au moment des faits, et la victime, âgée de 14 puis 15 ans, et, d’autre part de la situation de précarité familiale et économique de la victime en situation irrégulière sur le territoire français, puis mineur isolé après l’expulsion de sa mère, finalement confié à l’Aide Sociale à l’Enfance au motif que la présence d’un oncle ne pouvait être considérée comme une structure familiale sécurisante et enfin de l’absence de toute ressource financière du mineur qui, confronté aux nécessités de la vie quotidienne, s’est vu contraint de céder aux avances du prévenu moyennant rémunération ».
L’auteur des faits s’est néanmoins pourvu en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de son pourvoi, il soutient notamment que la Cour d’Appel n’aurait pas expliqué en quoi la différence d’âge constituait à elle-seule un élément de contrainte.
Il ajoute qu’il n’était pas possible de déduire de la situation de précarité familiale du mineur et de l’absence de structure familiale sécurisante un élément de contrainte à son égard.
Enfin, la Cour d’Appel aurait omis de caractériser l’élément moral de l’infraction.
Cependant, par arrêt en date du 4 septembre 2019 (Cour de cassation, Chambre criminelle, 4 septembre 2019, Pourvoi n°18-84334), la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par l’auteur des faits.
Selon la Cour de cassation, la Chambre Correctionnelle de la Cour d’Appel de MONTPELLIER a parfaitement déduit « des conditions d’existence de la victime au moment des faits, la caractérisation d’un élément de contrainte ».
Par conséquent, la condamnation de l’homme de 48 ans pour agressions sexuelles et corruption de mineur en récidive à douze ans d’emprisonnement et dix ans de suivi socio-judiciaire est confirmée par la Cour de cassation.
Cet article a été rédigé par Me Geoffrey Tondu, avocat à Bourges.