Médiator Confirmation de la responsabilité civile des Laboratoires SERVIER
Une patiente, qui s’est vue prescrire du Médiator entre le 9 février 2006 et le 17 octobre 2009, pour remédier à une tryglicéridémie, a présenté, dans les suites, une insuffisance aortique.
Après avoir sollicité l’organisation d’une mesure d’expertise judiciaire, la patiente a assigné, sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux, les Laboratoires SERVIER, producteur du Médiator, en réparation de son préjudice et mis en cause la Caisse Primaire d’Assurance Maladie du TARN qui a, elle-même, sollicité le remboursement de ses débours.
Par jugement en date du 22 octobre 2015 (Tribunal de Grande Instance de NANTERRE, 2ème Chambre, 22 octobre 2015, RG n°13/06173), le Tribunal de Grande Instance de NANTERRE a condamné les Laboratoires SERVIER à indemniser la patiente.
Par arrêt en date du 16 avril 2016 (Cour d’Appel de VERSAILLES, 3ème Chambre, 16 avril 2016, RG n°15/08232), la Cour d’Appel de VERSAILLES a confirmé, en toutes ses dispositions, le jugement rendu en première instance.
Les Laboratoires SERVIER se sont alors pourvus en cassation à l’encontre de cette décision.
Pour ce faire, les Laboratoires SERVIER soulevaient trois moyens.
Tout d’abord, le producteur du Médiator tentait de soutenir qu’en application des dispositions de l’article 4 du Code de Procédure Pénale, les juridictions civiles auraient du attendre de statuer sur la demande d’indemnisation formulée par la patiente dans l’attente que les juridictions pénales se soient défintivement prononcées sur l’éventuelle culpabilité des Laboratoires SERVIER pour tromperie aggravée, homicides et blessures involontaires.
Ensuite, les Laboratoires SERVIER contestaient l’imputabilité de l’insuffisance aortique présentée par la patiente à la prise du Médiator.
Enfin, le producteur du Médiator alléguait que sa responsabilité aurait dû être exonérée pour risque développement.
Toutefois, dans son arrêt en date du 20 septembre 2017 (Cour de cassation, Civile 1ère, 20 septembre 2017, Pourvoi n°16-19643), la Cour de cassation a rejeté l’ensemble des moyens soulevés par les Laloratoires SERVIER et confirmé l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de VERSAILLES.
En effet, selon la Cour de cassation, les juridictions civiles n’étaient, en aucun cas, tenues d’attendre de statuer sur les demandes indemnitaires formulées par la patiente dès lors que l’action introduite par la victime n’était pas fondée sur les infractions pour lesquelles une information judiciaire était ouverte à l’encontre de la société pour tromperie aggravée, homicides et blessures involontaires mais sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux.
L’action civile, engagée par la patiente, était donc totalement indépendante, de l’action publique menée contre les Laboratoires SERVIER.
De plus, la Cour de cassation relève que le collège d’experts, placés auprès de l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux, des Affections Iatrogènes et des Infections Nosocomiales et chargé d’émettre un avis sur les dommages et les responsabilités dans ce dossier s’était prononcé en faveur d’une imputabilité de l’insuffisance aortique de la patiente à la prise de Médiator.
Par ailleurs, aucune hypothèse faisant appel à une cause étrangère n’a été formulée et aucun élément ne permettait de considérer que la pathologie de la patiente était antérieure au traitement par le Médiator.
Enfin, la Cour de cassation rappelle qu’un producteur est responsable du dommage causé par le défaut de son produit à moins qu’il ne prouve que l’état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n’a pas permis de déceler l’existence du défaut.
Or, en l’espèce, selon la Cour de cassation, les Laboratoires SERVIER étaient mal fondés à invoquer une telle cause d’exonération de responsabilité.
En effet, les effets nocifs du Médiatoir étaient parfaitement connus au moment de la mise en circulation des produits administrés à la patiente entre 2006 et 2009.
Il était donc tout à fait possible de déceler l’existence du défaut affectant le Médiator.
Par conséquent, au vu de l’ensemble de ces éléments, les Laboratoires SERVIER sont civilement condamnés à indemniser l’ensemble des préjudices subis par la patiente du fait de la prise du Médiator sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux.
Cet arrêt revêt une importance toute particulière puisqu’il s’agit de le première décision, rendue par la Cour de cassation, dans le dossier du Médiator, confirmant la responsabilité civile des Laboratoires SERVIER.