Accident de ski-cross au cours d’une compétition sportive : le changement de trajectoire d’un skieur ne constitue pas un cas de force majeure

Accident de ski-cross au cours d’une compétition sportive : le changement de trajectoire d’un skieur ne constitue pas un cas de force majeure
Publié le 18/11/24

Le 24 janvier 2010, lors d’une compétition internationale de ski-cross organisée aux Etats-Unis, deux skieurs ont chuté alors qu’ils se trouvaient côte à côte.

Victime d’une fracture du rachis cervical, l’un des deux skieurs est resté atteint d’une tétraplégie. 

Estimant que sa chute avait été provoquée par un choc de ses skis avec ceux de l’autre skieur, la victime a assigné l’autre compétiteur ainsi que son assureur devant le Tribunal de Grande Instance aux fins d’expertise et d’indemnisation sur le fondement de la responsabilité du fait des choses, prévue à l’article 1384, devenu 1242 alinéa 1er du Code civil.

Par arrêt en date du 15 novembre 2022, la Cour d’Appel de GRENOBLE l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de l’autre compétiteur, estimant que le comportement de la victime aurait revêtu les caractères d’un cas de force majeure exonérant le second skieur de toute responsabilité, en qualité de gardien des skis.

Selon la Cour d’Appel de GRENOBLE, les skis du second compétiteur ont nécessairement joué un rôle causal dans l’accident.

Si la victime n’a pas commis de faute, son positionnement n’en a pas moins constitué, par son imprévisibilité, son extériorité et son irrésistibilité, liée à l’impossibilité qui était celle du second compétiteur de pouvoir manœuvrer lorsqu’il était en l’air pendant le saut, une cause étrangère revêtant les caractères de la force majeure.

La victime s’est alors pourvue en cassation à l’encontre de cette décision.

Aux termes de son pourvoi, la victime rappelle que l’irrésistibilité et l’imprévisibilité constitutifs de la force majeure s’apprécient au regard des circonstances particulières de la cause.

Dans une compétition sportive de haut niveau de ski-cross, n’est pas imprévisible le simple positionnement non rectiligne d’un concurrent lors d’une course jalonnée d’obstacles.

En considérant que le positionnement de la victime sur la piste de ski-cross était imprévisible pour l’autre compétiteur, après avoir pourtant écarté toute faute de la victime en relevant qu’elle n’avait pas brutalement coupé la trajectoire du second skieur, mais qu’elle avait simplement atterri, à la fin du cinquième saut, en chevauchant partiellement sa trajectoire, la Cour d’Appel a violé les dispositions de l’article 1384, devenu 1242 alinéa 1er du Code civil.

Par arrêt en date du 19 septembre 2024 (Cour de cassation, Civile 2ème, 19 septembre 2024, Pourvoi n°23-10638), la Cour de cassation a fait droit à l’argumentation de la victime et censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de GRENOBLE.

Comme le rappelle la Cour de cassation, un évènement n’est constitutif de la force majeure, permettant de s’exonérer de la responsabilité prévue par l’article 1384, devenue 1242 alinéa 1er du Code civil, que s’il est imprévisible, irrésistible et extérieure.

Or, la simple modification de sa trajectoire par un skieur engagé dans une épreuve de ski-cross ne constitue pas un évènement imprévisible pour un autre concurrent.

Par conséquent, le changement de trajectoire de la victime ne constituait pas un cas de force majeure pour l’autre concurrent. 

Ce dernier ne pouvait donc pas être exonéré de toute responsabilité sur ce fondement. 

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