Chute d’un piéton dans un parking et responsabilité de l’exploitant
Le 11 novembre 2011, la passagère d’un véhicule automobile a fait une chute alors qu’elle marchait dans un parking souterrain, exploité par la société Q’Park France.
Elle a alors assigné en responsabilité et indemnisation de son préjudice la société exploitante, ainsi que son assureur.
Par un arrêt rendu le 7 juillet 2021, la Cour d’Appel de BASTIA a rejeté ses demandes indemnitaires.
Les juges du fond ont en effet considéré que la société qui met à disposition un espace de stationnement, et par conséquent organise et réserve des voies de circulation pour les piétons qui sortent des véhicules ou qui viennent les reprendre, qu’ils soient conducteurs ou non, conclut avec eux un contrat qui la rend débitrice d’une obligation de sécurité, excluant l’application du régime de responsabilité extra contractuelle.
La victime s’est alors pourvue en cassation à l’encontre de cette décision.
Elle reproche à la Cour d’appel d’avoir jugé que le passager d’un véhicule automobile est lié par un contrat avec la société en tant que piéton utilisateur du parking, alors que seul le conducteur, qui extériorise son consentement en prenant un ticket pour pouvoir se garer dans le parc de stationnement, est lié par un tel contrat.
Par un arrêt rendu le 21 décembre 2023 (Cour de cassation, Civile 2ème, 21 décembre 2023, n°21-22.239), la Cour de cassation a censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de BASTIA et fait droit à l’argumentation développée par le piéton victime.
Selon la Cour de cassation, la responsabilité de l’exploitant d’un parking peut être engagée, à l’égard de la victime d’une chute survenue dans ce parking, sur le fondement de la responsabilité contractuelle si la victime a contracté avec cet exploitant et sur celui de la responsabilité extracontractuelle si la victime est tiers au contrat de stationnement.
En l’espèce, la question était de savoir si le passager d’un véhicule doit être considéré comme ayant contracté avec l’exploitant du parking ou non.
La Cour de cassation répond par la négative, en soulignant que la Cour d’Appel « n’a pas caractérisé l’existence d’un contrat liant la victime à la société exploitant le parc de stationnement ».
Cette solution résulte du principe selon lequel les responsabilités contractuelle et délictuelle ne peuvent se cumuler.
Dès lors que ses conditions d’engagement sont réunies, la responsabilité contractuelle doit s’appliquer.
En revanche, la responsabilité est extracontractuelle lorsque le dommage est indépendant de tout contrat.
Ainsi, le régime de responsabilité est différent selon que la victime soit conductrice ou passagère.
En l’espèce, pour engager la responsabilité contractuelle de la société à l’égard de la passagère, il faudrait pouvoir rapporter la preuve de l’existence d’un contrat liant la passagère à la société, ainsi que la preuve d’un manquement de la société à son obligation de sécurité.
Or, la passagère qui, contrairement au conducteur, ne prend pas de ticket et n’extériorise pas sa volonté d’être liée par un contrat à la société, ne peut être considérée, au même titre que ce dernier, comme étant partie au contrat de stationnement.
L’absence d’un lien contractuel entre la victime piétonne et la société exploitant le parking entraine donc, nécessairement, l’engagement de la responsabilité extracontractuelle de la société, sur le fondement de la responsabilité du fait des choses.
Article rédigé avec la participation de Monsieur Antoine THIBAUD, stagiaire.