Application de la responsabilité extracontractuelle de droit commun à celui qui n’est ni gardien ni conducteur d’un VTAM lors d’un accident de la circulation
La loi du 5 juillet 1985, dite loi Badinter, est un régime spécial, qui tend à indemniser les victimes d’accidents de la circulation.
Cette loi permet une réparation plus juste et plus rapide des préjudices des victimes.
De ce fait, la deuxième Chambre Civile de la Cour de cassation affirme dans un arrêt en date du 4 mai 1987 que « L’indemnisation d’une victime d’un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur ne peut être fondée que sur les dispositions de la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 à l’exclusion de celles des articles 1382 et suivants du Code civil ».
Ainsi, lorsque les conditions d’application de la loi Badinter sont remplies, cette dernière trouve à s’appliquer, à l’exclusion des dispositions des articles 1382 et suivants, devenus 1240 et suivants du Code civil.
En l’espèce, le 29 mars 2012, un cycliste s’est fait renverser par un autre cycliste, situé derrière lui, alors qu’un camion effectuait un dépassement.
La victime a alors assigné le cycliste, son assureur et la CPAM du Rhône en réparation de ses préjudices sur le fondement de la responsabilité extracontractuelle de droit commun prévue aux articles 1240 et suivants du Code civil, le conducteur du camion étant inconnu.
Le Fonds de Garantie des Assurances Obligatoires de dommage (FGAO) est intervenu à la procédure.
Par arrêt en date du 4 janvier 2022, la Cour d’Appel de LYON a débouté la victime de son action en réparation à l’encontre du cycliste en retenant qu’en cas d’implication d’un véhicule terrestre à moteur, en l’espèce le camion qui effectuait un dépassement, les dispositions de la loi Badinter du 5 juillet 1985 étaient d’application exclusive.
Le conducteur du camion étant inconnu, la victime aurait donc dû solliciter son indemnisation auprès du seul FGAO et non contre le cycliste.
La victime et le FGAO ont alors formé un pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt.
Aux termes de leur pourvoi, ils soutiennent « que les dispositions d’ordre public de la loi du 5 juillet 1985 n’excluent pas la responsabilité délictuelle de droit commun de celui qui n’est ni conducteur ni gardien du véhicule impliqué ».
Or, par arrêt en date du 30 novembre 2023, (Cour de cassation, Civile 2ème, 30 novembre 2023, Pourvoi n°22-18.525), la 2ème Chambre Civile de la Cour de cassation a cassé l’arrêt de la Cour d’Appel de LYON et fait droit à leur argumentation.
En effet, la Cour de cassation rappelle que « Si les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 relatives à l’indemnisation des victimes d’accidents de la circulation sont d’ordre public, elles n’excluent pas l’application de celles relatives à la responsabilité civile extracontractuelle de droit commun à l’encontre de toute personne autre que les conducteurs et gardiens des véhicules terrestre à moteur impliqué dans l’accident ».
Ainsi, la Cour de cassation affirme que même si un véhicule terrestre à moteur était impliqué dans l’accident, la victime pouvait agir contre le cycliste qui l’a fait chuter sur le fondement des articles 1240 et suivants du Code Civil au motif que celui-ci n’était ni conducteur ni gardien d’un véhicule terrestre à moteur.
Article rédigé avec la participation de Madame Léa BUSSEREAU, stagiaire.