Précisions sur l’élément moral de la séquestration 

Publié le 18/07/23

Dans la nuit du 2 au 3 octobre 2016, cinq hommes cagoulés ont pénétré dans un hôtel parisien et ont menacé le réceptionniste avec une arme à feu afin d’accéder à la suite où séjournait une célébrité américaine.

Deux d’entre eux se sont introduits dans la chambre, ont volé des bijoux et des liquidités et ont ligoté la victime présente avec du ruban adhésif.

Durant ces faits, la styliste de cette dernière, présente dans la suite, s’était enfermée dans une des salles de bain, sans que les voleurs ne la voient.  

Les cinq hommes ont fui les lieux en laissant la femme ligotée et le réceptionniste, attachés avec des menottes aux poignets et un serflex aux chevilles.

Le 19 novembre 2021, à l’issue de l’information, le juge d’instruction en charge de cette affaire a ordonné la mise en accusation des six personnes mises en examen. 

Les mis en examen et le Ministère Public ont interjeté appel de cette décision. 

La Chambre de l’Instruction a renvoyé deux des mis en examen devant la Cour d’assises de PARIS, le premier pour complicité de vol en bande organisée avec arme, complicité d’arrestation, enlèvement, séquestration ou détention arbitraire de plusieurs personnes et infraction à la législation sur les armes et le second pour complicité de vol en bande organisée avec arme et complicité d’arrestation, d’enlèvement, de séquestration ou détention arbitraire de plusieurs personnes. 

Pour chacun des deux, l’infraction de séquestration ou de détention arbitraire avait pour victimes la célébrité occupant la suite, sa styliste et le réceptionniste de l’hôtel.

Les mis en cause se sont alors pourvus en cassation à l’encontre de cet arrêt.

Le 24 aout 2022, la Chambre Criminelle de la Cour de cassation a censuré l’arrêt de la Chambre de l’Instruction et a ordonné le renvoi de l’affaire devant la Cour d’Appel de PARIS.

Le 5 décembre 2022, cette dernière a renvoyé, devant la Cour d’Assises de PARIS, les deux mis en cause, le premier pour complicité de vol en bande organisée avec arme, complicité d’enlèvement et séquestration aggravée et infraction à la législation sur les armes et le second sous les accusations de complicité de vol en bande organisée avec arme ainsi que complicité d’enlèvement et séquestration aggravée.

Les deux mis en cause ont formé un nouveau pourvoi en cassation à l’encontre de cet arrêt.

Aux termes de leur pourvoi, ils soutiennent qu’ils ne pouvaient pas être jugés coupables de complicité de séquestration ou de détention arbitraire à l’encontre de la styliste de la victime car ils n’avaient ni connaissance ni conscience de sa présence dans la salle de bain de la suite.

Par conséquent, l’élément intentionnel de l’infraction de séquestration se définissant par la volonté de priver une personne de sa liberté n’était pas caractérisé en l’espèce.

Toutefois, par arrêt en date du 15 mars 2023 (Cour de cassation, Chambre criminelle, 15 mars 2023, Pourvoi n°22-87.278), la Chambre Criminelle de la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par les auteurs. 

En effet, comme le précise la Cour de cassation, « Les juges ajoutent que si [la styliste] n’a pas été découverte par les malfaiteurs, la présence de ceux-ci dans l’immeuble l’empêchait de quitter les lieux. Ils relèvent par ailleurs que M. [H] a fourni aux auteurs du vol à main armée des renseignements relatifs à l’emploi du temps de [la victime du vol] cette nuit-là et qu’il ne pouvait ignorer qu’ainsi, il allait permettre la commission d’un vol en présence de la victime, qui nécessiterait donc la neutralisation de cette dernière ou des tiers présents dans l’hôtel. »

Dès lors, l’élément intentionnel de l’infraction de séquestration est caractérisé pour chaque personne qui a été privée de sa liberté du fait des actes matériels de l’auteur, que celui-ci ait eu conscience de sa présence ou non.

Article rédigé avec la participation de Madame Léa BUSSEREAU, stagiaire

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