Chute depuis le rebord d’une fenêtre en l’absence de garde-corps et responsabilité du fait des choses
En 2014, un homme, qui fumait assis sur le rebord d’une fenêtre, au 5ème étage d’un immeuble, a basculé dans le vide et a trouvé la mort.
Les parents et la sœur de la victime, ainsi que la société MACIF, ont alors assigné devant le Tribunal de Grande Instance territorialement compétent le propriétaire de l’appartement en réparation de leurs préjudices.
Le bailleur a, à son tour, appelé dans la cause la société chargée de la gestion du logement ainsi que l’assureur de cette dernière.
Toutefois, par arrêt en date du 23 juin 2020, la Cour d’appel de LYON a débouté les proches de la victime et leur assureur de leurs demandes indemnitaires.
Pour écarter toute responsabilité du propriétaire de l’appartement, la Cour d’Appel de LYON a estimé que la victime avait commis une faute d’imprudence en s’asseyant, en pleine nuit, au 5ème étage d’un immeuble, sur un rebord de fenêtre qui n’est habituellement pas fait pour s’assoir, alors qu’elle était alcoolisée, avait consommé du cannabis, qu’elle ne connaissait pas les lieux et qu’elle ne s’était pas assurée qu’il n’y avait pas de risque de chute.
Selon la Cour d’Appel de LYON, la faute de la victime apparaissait déterminante dans la survenance du dommage.
Par conséquent, la fenêtre, même basse et dépourvue de garde-corps, ne pouvait être considérée comme étant anormale et dès lors comme instrument du dommage en application de l’article 1242 alinéa 1er du Code civil, siège de la responsabilité du fait des choses.
Les proches de la victime décédée se sont alors pourvues en cassation à l’encontre de cette décision.
Aux termes de leur pourvoi, ils soutiennent que seule la faute d’imprudence de la victime à l’origine exclusive de son dommage fait obstacle à la mise en œuvre de la responsabilité du gardien d’une chose inerte.
Selon eux, le comportement de la victime n’était pas à l’origine exclusive de sa chute dès lors que la présence d’un garde-corps l’aurait nécessairement empêchée.
Par arrêt en date du 7 avril 2022 (Cour de cassation, Civile 2ème, 7 avril 2022, Pourvoi n°20-19746), la Cour de cassation a censuré l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de LYON et fait droit à l’argumentation développée par les proches de la victime décédée.
Comme le rappelle la Cour de cassation, « seul le fait de la victime à l’origine exclusive de son dommage fait obstacle à l’examen de la responsabilité du gardien de la chose » en application de l’article 1242 alinéa 1er du Code civil.
Or, comme le souligne la Cour de cassation, la fenêtre litigieuse, qui était située au 5ème étage et à 42 cm du sol de l’appartement, était dépourvue de garde-corps susceptible d’empêcher une chute, ce dont il se déduisait que l’imprudence de la victime n’était pas la cause exclusive du dommage.
Par conséquent, la responsabilité du propriétaire de l’appartement ne pouvait être écartée à la suite de la chute de la victime.
Article rédigé avec la participation de Madame Bertille COUTELLE, stagiaire en M2 de Droit de la Santé.